Home 2013 28 marzo EU. ESTERO FRANCIA. LA COSTITUZIONE DELLE UNIVERSITÀ E I DUE MODELLI: SORBONA E BOLOGNA
FRANCIA. LA COSTITUZIONE DELLE UNIVERSITÀ E I DUE MODELLI: SORBONA E BOLOGNA PDF Stampa E-mail

Le processus de constitution des universités en corporations reconnues fut un processus lent. On a parlé plus haut des deux modèles topiques de corporation universitaire. Il nous semble bon de nous appesantir sur ce point d’autant que les réformes actuelles de l’enseignement supérieur se passent sous l’esprit dit de Bologne. La référence à cette ville universitaire n’est pas du tout un hasard et fait référence en fait à une organisation bien particulière de l’organisation académique.
Dans le modèle parisien (la Sorbonne), le pouvoir appartient aux professeurs au sein de la corporation de maîtres et d’étudiants. Ceux-ci sont des clercs - liés à l’Eglise – et reçoivent grâce à cela un salaire. C’est dans un sens un avantage pour les étudiants dans la mesure où l’enseignement est gratuit – même si d’un autre côté on peut penser que cela donne un pouvoir de négociation plus important aux professeurs. L’institution parisienne est autonome et dans ses conflits avec l’évêque elle est soutenue par la papauté. Dans ses relations avec la ville (commune), les maîtres disposent d’un pouvoir via leur possibilité de faire la grève des cours et se disperser (par exemple en 1229-1231). C’est selon Verger (1973 ; 1999) un pouvoir important car l’université est un atout de poids pour la ville : prestige, foyer intellectuel, poids économique via la consommation qu’elle engendre. De fait, l’université dispose d’un important bargaining power face au roi, à l’Eglise de Paris, à la papauté et aux bourgeois parisiens. Elle va en profiter pour arracher une série de privilèges (en 1215 l’essentiel de ses institutions se trouve sanctionné). Les tentatives des pouvoirs de lutter contre une corporation organisée (entre 1215 et 1231) se solderont par un échec.
Dans le modèle de Bologne, on a affaire à une corporation d’étudiants. Le rapport à l’Eglise est plus lointain. L’institution est fondée sur la base d’une école notariale laïque. Le type d’étudiants que cette corporation va attirer est aussi différent de ceux de l’institution parisienne (Verger, 1973; 1999). Le rapport de force professeurs-étudiants est donc différent. Si Paris se caractérise par de jeunes adolescents pauvres face à des professeurs autonomes vis-à-vis d’eux du fait qu’ils sont payés par l’Eglise, à Bologne, nous avons (vers 1180-1220) une «université d’étudiants» dont le public est constitué d’étudiants matures (plus de 20 ans), venant de familles riches (notamment allemandes), bien plus capables de s’organiser et de négocier avec la commune (Verger, 1973, 1999). Une disposition particulière de la commune bolognaise va aussi réduire le pouvoir de négociation des professeurs. Dans le souci de fixer dans la ville des institutions sources de prestige et de richesse (mais aussi par méfiance), la commune exige des docteurs de ne jamais aller enseigner en dehors de Bologne (Verger, 1973; 1999). Les maîtres ne peuvent donc menacer la ville comme leurs collègues parisiens qui ont eux le droit de sécession. Du côté des étudiants, de puissants incitants à l’association existaient. En effet, souvent étrangers, ils ne peuvent prétendre à la protection de la commune et s’associent donc pour se défendre (assurer mutuellement leur sécurité et négocier avec la commune l’octroi de certains privilèges – voir Verger, 1973, 1999). Ils vont se heurter à l’opposition de la commune – qui cherche à limiter l’autonomie des universités – et des docteurs (selon eux, les étudiants ne peuvent à eux seuls constituer des universités car une corporation doit compter des maîtres et des apprentis, voir Verger, 1973, 1999, p. 39). Mais le pouvoir de négociation des étudiants face aux professeurs est important. Comme le note Verger (1973, 1999, p. 39), «beaucoup de docteurs, laïques, ne vivaient pas du revenu d’un bénéfice ecclésiastique mais des honoraires (collectae) versés par les étudiants. Ceux-ci pouvaient donc par le boycott obliger les professeurs récalcitrants à accepter leurs conditions». Face à la commune, les étudiants savent s’organiser et reçoivent souvent l’appui papal. Ceci mène en 1230 à la fin des conflits, au triomphe des étudiants. Les étudiants étrangers obtiennent tous les privilèges des citoyens de Bologne.
(Fonte: Jean-Luc De Meulemeester, http://pyramides.revues.org/804 21 | 2012, 261-289)